Etats-Unis : Pete Hegseth, un fana-mili contre les généraux
- Jean Dominique Merchet

- 5 oct.
- 3 min de lecture
Le secrétaire à la guerre incarne la révolte des sous-off et des officiers subalternes de terrain contre les états-majors

#Analyse Le secrétaire américain à la guerre Pete Hegseth a fait sensation, le 30 septembre, en convoquant les officiers généraux pour leur délivrer le message suivant : «finies les conneries». Ces «conneries», c'est tout ce qu'on l'on range sous l'appellation de wokisme. N'y voir qu'une simple illustration de plus de l'offensive réactionnaire - au sens propre - de l'administration Trump contre le «progressisme» serait passé à côté de la dimension proprement militaire de ce qu'incarne Pete Hegseth. Et des conséquences de sa politique sur les forces armées américaines.
Pete Hegseth, 45 ans, a servi pendant près de vingt ans dans la Garde nationale, comme militaire à temps partiel. Etudiant à Princeton 2021, il intègre une préparation militaire (Army Reserve Officers' Training Corps) et devient officier d'infanterie dans la Garde nationale du Minnesota. Il est déployé à trois reprises en opérations extérieures, au camp de Guantanamo, en Irak et en Afghanistan, pour une durée totale d'environ deux ans. En Irak, il se voit décerner la Bronze Star Medal pour son engagement dans des zones de combat. Il quitte la Garde nationale en 2021 avec le grade de commandant (major), après avoir été retiré d'une mission lors de l'investiture du président Biden en raison d'une controverse concernant un tatouage. Parallèlement, il s'engage dans la défense des vétérans et publie des livres, dont «The War On Warriors»,en 2024. Il critique vivement les officiers généraux, les accusant de privilégier leur carrière, les contrats avec les entreprises de défense, et la conformité politique plutôt que le bien-être des troupes.
Dans un style très «viriliste», Pete Hegseth tente d'être le porte-parole de la troupe contre la «strasse» (les généraux) comme on dit dans l'armée française. Dans son discours du 30 septembre, il fait explicitement référence aux E-6 et O-3, c'est à dire aux sergents-chefs et aux capitaines. Hegseth, c'est la révolte des sous-off et des officiers subalternes de terrain contre les états-majors, après deux décennies de guerres perdues. Un grand classique et une musique familièredans toutes les armées , en particulier dans les unités de combat. Evidemment, pour les généraux, ça pique un peu des yeux d'entendre leur patron tenir un tel discours...
Pete Hegseth fait toutefois référence à un célèbre général, George Patton, qui n'hésitait pas à dire à ses troupes : « Aucun bâtard n’a jamais gagné une guerre en mourant pour son pays. Il l’a gagnée en faisant mourir l’autre pauvre idiot de bâtard pour son pays. » Il cite également le général Schwarzkopf (de la guerre du Golfe) : interrogé sur le pardon à accorder à l'ennemi, il aurait dit en substance : «Pardonner c'est le rôle de Dieu, le nôtre est d'organiser le rendez-vous de nos ennemis avec Lui». Voilà pour la philosophie du Département de la Guerre.
Lors de son premier mandat, Donald Tump s'était entouré de généraux (James Mattis, Mike Flynn, John Kelly, HR McMaster) à des postes-clés. Ce n'est plus le cas lors de son second mandat. Au contraire, il en a démis près d'une vingtaine, la plupart des postes les plus élevés. Son administration fait appel à d'autres profils, comme celui de Hegseth ou du vice president J.D. Vance (Caporal dans les Marines, Reporter de combat, déployé en Irak en 2005), du conseiller à la sécurité nationale Mike Waltz (colonel des Special Forces) ou de la directrice nationale du renseignement Tulsi Gabbard (Lt-colonel de l'Army, déployée en Irak et au Koweit).
La posture de Pete Hegseth fait songer à des classiques hollywoodiens, incarnés par John Wayne ou Clint Eastwood. Elle parle à l'imaginaire américain, même si elle est choque une autre Amérique.
S'il vise à redonner une éthique de «warriors» aux forces armées américaines, Pete Hegseth pourrait toutefois se heurter à un obstacle, celui des ressources humaines. Les chiffres de recrutement se sont récemment améliorés, mais le défi reste de taille surtout si les critères physiques d'engagement sont relevés. L'obésité, la santé mentale, la vue et l'ouïe excluent une partie de la jeunesse d'un potentiel recrutement. Par ailleurs, la guerre évolue, comme on le voit en Ukraine : savoir piloter un drone FPV n'exige pas d'enchaîner les pompes. Idem pour un geek dans la bataille cyber. Pete Hegseth ne peut l'ignorer mais ce n'était visiblement pas le sujet du jour.



Bonjour et merci de reprendre votre blog ! Auriez-vous une référence pour les problèmes d’aptitude médicale à l’engagement que vous évoquez au sujet des jeunes américains ?
Cordialement