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Service national : les volontaires ne doivent pas devenir des supplétifs

  • Photo du rédacteur: Jean Dominique Merchet
    Jean Dominique Merchet
  • 2 déc.
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : il y a 7 jours

La France devrait s'inspirer du modèle américain de la Garde nationale en n'hésitant pas à engager les volontaires en opérations extérieures.


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Le nouveau "service national", tel qu'il a été présenté jeudi 27 novembre par le président Macron, est globalement une bonne idée. A une exception près , lorsqu'il est dit que «ce dispositif exclut toute participation à des opérations extérieures ou à des déploiements en zone de conflit».

C'est une mauvaise option, car elle créée deux catégories de militaires, pourtant tous volontaires pour servir les armes de la France.


On peut comprendre la prudence de l'Elysée sur cette question, alors que la population craint de plus en plus le retour de la guerre. Une peur nourrie par les déclarations maladroites du chef d'état-major des armées ("Accepter de perdre nos enfants") et l'insistance d'Emmanuel Macron à vouloir déployer des troupes en Ukraine, même si après un cessez-le-feu.


Rappelons qu'à l'époque du service militaire obligatoire de nombreux jeunes servaient en dehors du territoire national, c'est-à-dire en Allemagne où ils étaient déployés pour faire face à la menace soviétique, dans une logique de dissuasion. Pourquoi n'en serait-il pas de même aujourd'hui sur le flanc Est, en Estonie ou en Roumanie, où l'armée française est présente, comme elle l'était jadis en Allemagne de l'Ouest ? Rappelons aussi qu'à cet époque les jeunes appelés pouvaient librement choisir un VSL (Volontaire service long) et, ainsi partir en opex, au Liban, au Tchad et même à Sarajevo.


Les concepteurs du nouveau service national auraient dû imaginer une réforme beaucoup plus ambitieuse, inspirée du modèle américain de la Garde nationale. Las ! Il faut se contenter de cette annonce, à moins de dix-huit mois de la fin du mandat du président Macron. On ignore ce que le futur pouvoir (élyséen et parlementaire) fera de cette initiative en 2027 - le service national ne concernant alors que quelques milliers de jeunes. Plutôt que de lancer un improblable Service national universel (SNU) qui a fait naufrage, Emmanuel Macron a manqué l'occasion d'une réforme marquante du lien entre la nation et son armée.


Les jeunes volontaires du service national feront seulement un mois de "classes", alors que la formation initiale des jeunes engagés durent trois mois (12 semaines en CFIM dans l'armée de terre, par exemple). Il aurait été plus judicieux de proposer un engagement des jeunes volontaires pour une longue durée, mais à temps partiel, comme dans la Garde nationale américaine. Après une formation initiale de quelques mois et un premier séjour en unités, le jeune volontaire serait devenir réserviste opérationnel, servant quelques semaines par an, voire une plus longue période pour certaines missions. La question de la rémunération n'est pas accessoire : les 800 euros («solde d’au moins 800 € brut par mois hors primes éventuelles, non imposable») ne sont pas suffisants. En Allemagne, pour un système comparable, le montant de la solde est de 2600 euros ! Aux Etats-Unis, un membre de la Garde nationale perçoit au minimum 2000 dollars par mois (à temps complet) pour son entrainement - et la même solde qu'un militaire d'active s'il est engagé en opérations.


Surtout, les volontaires doivent avoir des missions comparables à celles des autres militaires. C'est le cas des Gardes nationaux et des Réservistes américains, qui sont systématiquement engagés au côté de l'active dans les opérations. On estime que près d'un million d'entre eux ont participé aux guerres d'Afghanistan et d'Irak. Il s'agit d'une obligation légale depuis la doctrine Abrams de Total Force Policy. L'idée de manoeuvre est que toute opération militaire soutenue nécessite l'engagement des réserves (Garde nationale et Réserves de l'Army).


Avec la réformette Macron, on est loin d'une telle ambition de refondation du lien armée-nation. C'est dommage. Imposée par Jacques Chirac en 1996, la professionnalisation des armées a été un grand succès - l'armée française est l'une des meilleures au monde - mais, une génération plus tard, elle a besoin d'être revue, notamment l'articulation entre professionnels et volontaires/réservistes dans un souci de remontée en puissance. Une nouvelle fois, il faut rompre avec "l'armée de nos habitudes" dénoncée par le général De Gaulle. Ni l'Elysée, ni les états-majors n'y étaient prêts. Et cela à accoucher de ce petit "service national".



 
 
 

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